Lorsqu’un imminent pneumologue s’engage sur la voie de la légalisation du cannabis, il est important de relater le contenu de ses propos.
Le Professeur Bertrand Dautzenberg, pneumologue du groupe hospitalier de la Pitié-Salpêtrière à Paris, vient de se prononcer en faveur d’une légalisation du cannabis « encadrée ».
Focus.
« L’illégalité d’une substance favorise la circulation de produits plus toxiques ». Le Pr Dautzenberg fait référence aux cannabis qui circule en France et dont le taux de THC ne cesse d’augmenter. Il ajoute que « le cannabis dans l’Héxagone aujourd’hui, c’est l’alcool frelaté au temps de la prohibition ».
La Loi Mazeaud est passée en 1970, le jour où les français ont la tête ailleurs et s’apprêtent à célébrer la nouvelle année. Cette législation encadre depuis, l’interdiction de consommer du cannabis dans le pays. Force est de constater que la loi anti-drogue n’a enrayé ni le trafic, ni la consommation et que toute tentative de prohibition est vouée tôt ou tard à l’échec. L’histoire se répète. Et, l’échec cuisant de la loi – notamment – anti-cannabis le démontre depuis plus de 45 ans. « Cette méthode ne fonctionne pas. » insiste le médecin et d’ajouter : « La prohibition n’a pas marché pour l’alcool, elle ne marche pas pour le cannabis, comme elle ne marcherait pas contre le tabac ».
Les derniers chiffres de l’INPES sont éloquents. D’après l’enquête de l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé, la 45 % des jeunes français (soit quasiment la moitié d’entre eux) ont déjà consommé du cannabis. Plus d’un sur trois a fumé un joint au cours de l’année écoulée. Globalement, 17 millions de Français ont déjà expérimenté cette plante. Ce chiffre représente environ 40 % des 15-64 ans en augmentation de 9 % entre 2010 et 2014.
« Parmi les 28 Etats membres de l’UE, la France est aujourd’hui le plus gros consommateur de cannabis » rappelle Bertrand Dautzenberg.
« La consommation du cannabis augmente et se banalise au point d’être aussi – voire plus – banale que le tabac ou l’alcool » déclare le médecin et pense que « pour avoir du cannabis propre sur le marché, donc moins toxique pour les usagers, il faut qu’il soit légalisé ».
Légalisation n’est pas synonyme d’incitation à la consommation
Le Pr Dautzenberg, la libéralisation du cannabis ne favoriserait pas sa consommation. « Il n’existe aucun lien entre la sévérité de la répression et le niveau de consommation de cannabis », insiste-t-il. « Une reprise en main du marché par l’Etat comme en Uruguay casserait les trafics qui ouvrent aux jeunes l’accès aux autres drogues. Cela permettrait une prévention efficace chez les jeunes et en milieu du travail ». Par ailleurs, la dépénalisation « permettrait d’étiqueter et de contrôler les produits. Et après un ou deux ans, temps nécessaire pour briser le marché noir, une augmentation adaptée des taxes permettra de faire reculer la consommation, comme dans les Etats qui ont encadré la légalisation du cannabis ».
Le point qui n’est pas éclairci lors de l’interview du Professeur concerne le taux de THC admissible. Un produit plus fort en THC est censé réduire la consommation de matière. Cela entraîne une diminution des effets négatifs sur le système respiratoire car moins de goudron est inhalé.
Autre question : le cannabis « encadré » serait-il l’équivalent d’un vin ou d’un rhum ? Les consommateurs chercheront-ils alors l’équivalent d’un alcool « fait maison », à priori avec une concentration en principe actif bien plus élevée que la norme légale ? Le marché noir en sera-t-il pour autant ralenti ou diminué ? Pour rappel, les Etats américains qui ont légalisé l’usage du cannabis et qui autorise toute sorte de cannabis quel que soit sa concentration en THC ont vu, eux, les chiffres de la délinquance baissé. Les mafias mexicaines a du augmenté la qualité de leurs produits et à en baisser le prix.